Extrait de la Chronique, un poème : Le Gouffre.

 

 

Bien que dans l’Achéron se reflète mon front,

Mon esprit souffreteux cherche un nouvel affront.

Je rêve de l’écrire : un poème si noir

Que mon corps tout entier serait un encensoir

Où brûleraient mon âme et mon cœur trop avide,

Où j’userais mes yeux sur les rebords du vide.

Je rêve d’un malheur à nul autre pareil,

Je rêve de la mort et d’un nouvel éveil.

 

 

Peut-être que le Pourpre, à mon poignet tranché,

Donnera l’illusion d’un bijou recherché :

Un bracelet de sang sur mon bras immobile

Un instant suspendu devant la Faux habile.

Je la rêve : une encre si noire et si profonde

Qu’elle souille mes doigts et détruit tout mon monde

Dans le flot continu de son aberration

Quand cède la raison devant la destruction.

 

 

Ainsi donc, l’ai-je écrit ? Ce poème si noir

Qu’il laisse sur ma langue un goût de désespoir ?

Ou faudra-t-il qu’un jour, sans haine et sans amour,

J’aille chercher au fond d’un gouffre sans retour

L’Enthousiasme des dieux, l’Inspiration suprême

Dans le dernier soupir de ma bouche bien blême ?

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